DÉCRYPTAGE – Voyager et être payé pour le raconter : c’est le rêve de nombreux créateurs de contenus. De Dubaï à la France, certains captivent une large audience et sont devenus des atouts majeurs pour les acteurs du tourisme. Selon leur notoriété, ils peuvent gagner plusieurs milliers d’euros pour un seul post.
Leur quotidien ressemble à celui d’une carte postale : plages, hôtels de charme et escapades natures. Ils se nomment Anil B, Mille’s Voyages, Bruno Maltor… Ces créateurs de contenus voyage parcourent le monde, de la Suisse à la Corée du Sud, caméra en main. Ce sont des «influenceurs», des personnes dont la notoriété leur permet d’orienter les choix des internautes et utilisateurs de réseaux sociaux grâce aux publications qu’ils partagent. Anil Brancaleoni, 35 ans, figure parmi les «tops influenceurs», avec une audience comprise entre 500.000 et 1 million d’abonnés, selon Reech, entreprise spécialisée en marketing d’influence, et emmène son public des plages sauvages du Brésil aux gratte-ciels futuristes de Dubaï.
Guillaume Payen, 26 ans, «middle influenceur» (15.000 à 100.000 abonnés), sillonne la France en train et en bus, révélant ses trésors cachés et découvertes locales. Et ça marche. Tous deux fédèrent des communautés engagées. Selon un récent rapport publié par le cabinet d’études Phocuswright, deux voyageurs sur trois âgés de moins de 55 ans déclarent avoir réservé un séjour après avoir consulté des publications d’influenceurs sur les réseaux sociaux.
Hôtels, compagnies aériennes, offices de tourisme… recourir aux influenceurs est devenu un levier privilégié pour valoriser destinations et services. «Notre territoire fait face à beaucoup de concurrence, c’est un moyen efficace pour nous de gagner en visibilité», explique Sophie Andreu, responsable communication de l’Office de Tourisme Beaucaire-Terre d’Argence (Gard). «C’est une pratique habituelle des offices de tourisme, mais pas chez tous, car les coûts peuvent être importants pour les créateurs à forte popularité», précise Yannick Corbel, directeur de Lorient Bretagne Sud Tourisme (Morbihan). Mais tout a un prix : combien sont rémunérés ces influenceurs en échange des photos et vidéos qu’ils produisent et partagent ?
Guillaume Payen : de 0 € à 3000 € par mois en explorant la France
Originaire de Bretagne, Guillaume Payen, 26 ans, crée du contenu voyage depuis plus de neuf ans. En 2016, il publie ses premiers posts sur Facebook, sans imaginer que ses escapades finiraient par devenir son métier. Depuis le CM1, son appareil photo ne le quitte jamais, témoin de ses escapades en colonies de vacances et de son goût précoce pour l’exploration. Pendant ses études en communication et tourisme à Toulouse, il sillonne la France, de Montpellier à Biarritz en passant par Dinan… et ne s’arrêtera plus. Aujourd’hui, il compte 62.000 abonnés sur Instagram.
Pour le jeune Breton, l’itinéraire se construit entre rencontres, coordonnées GPS et paysages. «Je mets un point sur la carte et je m’y rends en bus ou en train», sourit-il. La méthode est aussi spontanée qu’efficace. «Ce que j’aime, c’est faire découvrir de jolies choses autour de chez moi». Sa vision du voyage est simple, locale et accessible. Il montre qu’une escapade peut être riche en expériences sans être coûteuse : un trajet en bus à 2 €, un dortoir et un sandwich suffisent. Libre dans sa création, il refuse toute pression : parfois cinq publications par semaine, parfois aucune, jamais par obligation.
Financièrement, Guillaume Payen vit de son métier depuis 2022-2023. «J’ai fait ça pendant 5 ans en gagnant 0 euro», raconte celui qui vit désormais à Montpellier. Entre 2019 et 2022, il percevait entre 200 et 500 € par mois. Aujourd’hui, son activité est à temps plein et il se considère comme chanceux, car les projets viennent à lui. Il collabore avec des châteaux, des hôtels et reçoit chaque mois des demandes d’offices de tourisme. Son travail influence désormais le choix de ses destinations, comme Cahors, où il promeut l’Occitanie Rail Tour, un pass permettant de voyager en illimité dans la région dès 20 € pour deux jours. En 2025, il a connu sa meilleure année en termes de revenus. «Je gagne entre 2000 et 3000 € nets par mois», révèle-t-il. Cette évolution le conforte dans son désir de continuer à faire ce qu’il aime, au plus près de la nature, avec liberté et simplicité.
Source : Le Figaro





